À la fortune du mot

< mardi 6 avril 2004 >
Vocabulaire

Sanguinolent. Voilà un adjectif dont on aura usé (abusé ?) pour évoquer le film de Mel Gibson. Au point que certains, probablement intimidés par les micros qui se tendaient à la sortie des salles obscures, ont cru devoir le gratifier d'un g supplémentaire. Ce « sanguignolent », qui tend à se répandre, est évidemment un pur barbarisme... quand bien même, pourquoi ne pas le reconnaître, l'excès d'hémoglobine confinerait souvent au... grand-guignolesque !

Martyr. Voilà le moment ou jamais de rappeler que le martyr (sans e, à moins qu'il ne s'agisse d'une femme) est celui qui endure le martyre (avec e). Attention, également, au martyrologe, liste des personnes qui ont souffert ou sont mortes pour une cause : on n'a que trop souvent tendance à le rebaptiser « martyrologue » !

Crucifiement et crucifixion. Les deux termes cohabitent mais ont, depuis longtemps, marqué leurs territoires respectifs. Au premier le supplice de la croix dépouillé de toute référence religieuse ainsi que le sens, littéraire et figuré, de « grande souffrance ». Au second le martyre du Christ... et toute œuvre d'art le représentant.

Stigmate. Ces cicatrices qu'il fallut exhiber pour convaincre saint Thomas sont du masculin. Comment ne pas saisir l'occasion — plutôt que l'opportunité ! — d'apprendre à ceux qui ne le sauraient pas que l'infortuné Thomas a servi à désigner, dans les milieux populaires, le pot de chambre ? Un chant religieux n'ordonnait-il pas « Vide, Thoma, vide latus » (« Vois, Thomas, vois mon flanc ») ? De là à ce que cela devînt, par malice, « Thomas, vidé l'as-tu ? », il n'y avait que l'épaisseur... d'un jet d'urine !