French spoken !

< mardi 4 avril 2006 >
Complément

Nul doute que pour le président de la République l'épisode ne semble déjà lointain, enfoui qu'il se trouve probablement sous des préoccupations plus brûlantes. Nul doute encore qu'il ne paraisse anecdotique à beaucoup, eu égard aux événements autrement graves que connaît en ce moment le pays. Nous manquerions néanmoins à nos devoirs si nous ne saluions pas sous cette rubrique la réaction qu'a eue le chef de l'État, le 23 mars dernier. N'a-t-il pas, entraînant à sa suite deux de ses ministres, quitté la salle du Conseil européen alors qu'Ernest-Antoine Seillière s'apprêtait à prononcer un discours... en anglais ? Ce dernier n'est-il pas après tout, comme devait le remarquer, faussement étonné, l'ex-patron des patrons français, la « langue de l'entreprise » ? Sans doute. Mais il est tout aussi indéniable que le français est, au même titre que l'anglais et l'allemand, une des langues de travail de l'Union européenne. Que deviendra-t-il si nos élites, celles-là mêmes qui devraient se sentir concernées par sa survie, s'ingénient à le mépriser ?

Il se trouve que cette semaine-là nous rentrions du Québec. Heureux d'y avoir vu la langue française aimée, défendue, révérée telle une richesse nationale. Honteux, aussi, d'avoir dû prendre conscience, par contrecoup, de nos propres insuffisances dans ce domaine. Et par quel message, s'étalant sur des panneaux géants, croyez-vous que nous avons été accueilli à Roissy-Charles-de-Gaulle ? « Aéroports de Paris (prononcer Pariss, évidemment) : the world is our guest.  » Allez vous étonner, après cela, que des Seillières, pour qui visiblement l'argent n'a pas d'accent, foulent aux pieds leur langue maternelle ! Le seul langage qui vaille, n'est-ce pas de toute façon celui du commun euro ?