À Emmanuel Macron :
« Postlude
à l'après-midi d'un hygiaphone »
En entendant le chef de l'État déclarer en Chine qu'à la « diplomatie de l'hygiaphone et de la provocation » il préférait des entretiens efficaces et amicaux, nous avons d'abord choisi de nous faire l'avocat du diable.
En incorrigible courtisan qu'il est, votre serviteur a voulu croire que l'on souhaitait privilégier une discussion sans filtre aucun, une conversation à brûle-pourpoint que ne viendraient en rien dénaturer les vaines précautions du politiquement correct. Ne convenait-il pas d'ailleurs de voir là une fine allusion au comportement héroïque du sinophile Jean-Pierre Raffarin, parti en 2003 pour Pékin et dédaignant, en pleine épidémie de SRAS, de porter un masque de protection ? Mais, outre que cela ne cadrait guère avec la « provocation » qui suivait, il nous a suffi de nous replonger dans le passé récent du président de la République pour constater que ce dernier n'en était pas, en l'occurrence, à son coup d'essai. En avril, déjà, il avait réclamé un hygiaphone pour s'adresser aux ouvriers de Whirlpool ! L'affaire avait fait grand bruit, ses détracteurs criant au lapsus révélateur : ne fallait-il pas décidément que sortît de ce corps fringant de trentenaire un certain Édouard Balladur, régulièrement rhabillé par les Guignols de l'info en personnage allergique aux dégoûtantes promiscuités de la rue et du métro ?
Et voilà que, dans un contexte autrement apaisé que celui de la dernière présidentielle, notre homme récidive sans vergogne ! Il faut croire, pour que le chat échaudé ne se soit pas ainsi davantage méfié de l'eau froide, que la Grande Muraille est propice aux bravitudes et dérapages de toutes sortes (Ségolène, si tu nous lis...) ; qu'il ne s'agissait pas là, surtout, d'un lapsus mais d'une confusion en bonne et due forme entre mégaphone (cet « appareil portatif servant à amplifier la voix ») et hygiaphone (ce « dispositif formé d'une plaque transparente perforée qui permet à des personnes placées de part et d'autre d'un guichet de se parler en évitant toute contamination »). Avec ou sans majuscule, selon que vous considérez, à la suite de Larousse, qu'il sied de respecter la marque ou, à l'instar de Robert, que ce qu'il peut arriver de mieux à ladite marque est encore, par le truchement de la minuscule, de devenir un nom commun !
Ne serait-il pas opportun que la première dame, prof de lettres de son ancien mais ô combien respectable état, renouât impromptu avec ses cours d'étymologie ?