On connaît la chanson,
mais on se trompe souvent
sur les paroles !
Qui ne s'est entendu demander, ces dernières semaines, quelle était la chanson qu'il préférait chez Johnny ? Le chroniqueur de langue tend ici à renouveler le genre, en citant celle qui, depuis toujours, l'empêche de dormir...
Mais vous avez déjà deviné, lecteurs futés que vous êtes, que nous voulons parler du Pénitencier. En voilà un qui souffre mille morts sur le plan orthographique, son « c » cédant plus souvent qu'à son tour la place à un second « t » ! La faute prospère sur la Toile, et n'y échappent pas même les journaux qui ont pignon sur rue : « Les gardiens ferment les portes du pénitentier » (Paris Match) ; « Des policiers présentent notamment des armes, munitions et de la drogue saisies dans les cellules du pénitentier de Marco Aurelio Seto » (La Croix) ; « Les portes du pénitentier viennent à peine de se refermer sur Tupac Shakur pour une peine de quatre ans et demi » (Les Inrocks).
Tout cela ne serait rien si ledit « pénitentier » ne servait également, et de façon tout aussi indue, d'adjectif : « Les surveillants du centre pénitentier prêtent serment » (Le Parisien) ; « Arthur, journaliste et ancien surveillant pénitentier, assure même qu'il y en a autant (on parlait là de téléphones portables) que de prisonniers » (L'Express) ; « L'incident n'aurait causé aucun blessé, ni chez les détenus, ni au sein du personnel pénitentier » (La Voix du Nord, charité bien ordonnée... finit par soi-même !). Et que dire du féminin « pénitentière », qui n'en fait pas moins florès un peu partout : dans les colonnes de Midi libre (« Un homme de 43 ans s'est suicidé ce week-end à la maison d'arrêt de Gradignan, a-t-on appris ce midi de source pénitentière »), sur le site d'Europe 1 (« Oscar Pistorius souffre "d'une contusion" à la suite d'une "altercation avec un autre prisonnier au sujet de l'utilisation d'un téléphone public", a déclaré un porte-parole de l'administration pénitentière »), voire dans un catalogue de la prestigieuse maison Gallimard, lequel n'hésite pas à parler de l'Australie comme d'une « région métamorphosée en colonie pénitentière par la couronne britannique » ! Faut-il rappeler que le seul terme recevable est en l'occurrence pénitentiaire, au féminin comme au masculin ? Les initiés auront d'ailleurs reconnu le même type de dérapage que pour l'infortuné pécuniaire, trop souvent mis... en pièces par les barbarismes « pécunier » et « pécunière » !
Johnny, à présent que tu es là-haut, si tu pouvais retenir la nuit qui tombe sur notre orthographe...