Vive les vacances ? Vivent les vacances ?

Au commencement était le verbe

< mardi 1er juillet 1997 >
Chronique

Disons-le tout net : il nous étonnerait que l'orthographe de vive constituât le souci majeur de ceux qui, il y a quelques jours, ont confié à tous les échos leur joie d'en avoir fini avec l'année scolaire. Mais il n'est jamais trop tôt pour s'attaquer aux devoirs de vacances et nous le faisons d'autant plus volontiers que la question nous a été maintes fois posée... Aussi bien, il convient de dépassionner le débat : ni l'une ni l'autre forme ne saurait être tenue pour une faute, et les deux versions ont, aujourd'hui encore, leurs adeptes. Bornons-nous à constater ici que l'accord tombe de plus en plus en désuétude : il n'y a plus guère que Jacques Capelovici pour estimer, dans Le français sans fautes, que le pluriel est plus élégant et qu'il satisfait davantage la logique. À l'origine, c'est vrai, il s'agissait de souhaiter longue vie à une personne que l'on acclamait. Vive était alors perçu comme un subjonctif elliptique du verbe vivre — que l'on songe aux Qu'ils vivent ! de nos vivats flamands — et l'accord allait de soi. Petit à petit, pourtant, vive a perdu son sens premier en même temps qu'il étendait son rayon d'action à ce qui n'était pas doué de vie. Réduit à une simple formule d'approbation qui, comme le souligne Hanse, n'impliquait plus un souhait de longue existence, il a vu sa valeur verbale s'estomper et l'on n'a bientôt plus perçu en lui qu'un « introducteur » qui n'avait pas lieu de varier en nombre : Vive les morts ! écrivait Roland Dorgelès, un rien provocateur... L'explication vaut aussi, soit dit en passant, pour l'expression de l'hypothèse dans l'énoncé d'un problème : « Soit ou Soient deux droites parallèles... ? » Là encore, les deux graphies sont recevables, et les mathématiciens restent nombreux à sentir dans cet « introducteur » le subjonctif du verbe être. Mais pour les raisons exposées plus haut, l'invariabilité gagne du terrain. Grevisse va jusqu'à signaler que, pour mieux le distinguer de la forme verbale, les Wallons n'hésitent pas à prononcer le t final ! Voilà qui, nous l'espérons, déculpabilisera plus d'un professeur de mathématiques soucieux de préparer dès maintenant les cours de la rentrée...