La « saga de l'été » fait un malheur sur TF1
Face à Dolmen, la concurrence peut toujours... s'aligner !
Saga Armorica ! Attention les secousses... pour l'Audimat ! Le feuilleton de l'été a, sur TF1, pris un départ tonitruant. Il serait pourtant excessif de prétendre que ce Dolmen-là est un monument, ou que son intrigue est à marquer d'une pierre blanche. Elle s'attache tout au plus à respecter — Pagnol pas mort ! — la sacro-sainte règle des « quatre tiers » : un tiers de charme (un gros tiers même car, face à ceux de l'accorte Ingrid, les reliefs de Belle-Île font parfois piètre figure) ; un tiers de régionalisme (quand le Nord, en l'espèce, serait traditionnellement moins bien servi que la Provence et la Bretagne) ; un tiers d'ésotérisme, toujours bienvenu au pays de Descartes ; un tiers d'hémoglobine enfin, ne serait-ce que parce que, dans ces histoires qui font la part belle à l'hérédité familiale, bon sang ne saurait mentir ! Le tout hésite entre Club des cinq d'Enid Blyton et bédés de Ric Hochet. Mais peu importe, au fond : l'essentiel n'était-il pas de cumuler les audiences respectives de nos caïds du polar en réunissant Cordier, Moulin et Balaguère sur une même affiche ? Et puis il y a ce mot, magique, à lui seul sésame pour le rêve : saga. D'autant plus évocateur que l'on ne sait plus vraiment ce qu'il signifie. À l'origine, son emploi était réservé aux récits mythologiques de la littérature médiévale scandinave, eux-mêmes transcriptions de lointaines traditions orales : ce saga nordique serait en effet à rapprocher de l'allemand sagen, « dire » ! Par la suite, et parce qu'il faut bien vivre avec son temps, fût-il infiniment plus prosaïque, l'anglais a recyclé le mot, en le dépouillant de sa dimension légendaire : ce dernier ne trouva plus à s'appliquer, dès lors, qu'à certaines familles dont on contait par le menu le devenir, sur plusieurs générations. Qui ne se souvient, à l'aube des années 70, de la très victorienne Dynastie des Forsyte, fresque télévisée inspirée du cycle romanesque de l'écrivain britannique John Galsworthy ? La saga d'aujourd'hui semble avoir encore revu ses ambitions à la baisse : il ne s'agit plus que d'une histoire suffisamment interminable pour meubler le PAF durant la majeure partie de l'été... Détail piquant que rapportent rarement nos dictionnaires : la saga est aussi une sauterelle du midi de la France ! Il n'en faudrait pas beaucoup plus pour que des pisse-froid assimilent le roman-feuilleton estival à une authentique catastrophe naturelle...