Un cocker au secours des diabétiques

Merci qui ? Merci mon chien !

< mardi 8 avril 2003 >
Chronique

À l'heure où l'on se surprendrait à douter des hommes, il est réconfortant d'observer que, chez les animaux du moins, on n'arrête pas le progrès. Naguère, les chiens se bornaient à vous réclamer du sucre. Aujourd'hui, ils vous font savoir que votre stock s'épuise. En témoigne cette récente information que l'on doit à Science et vie : un cocker aurait été spécialement dressé pour dépister chez son maître diabétique, et sur la seule foi de son haleine, une crise d'hypoglycémie ! Un précédent ô combien riche de perspectives : à quand le chow-chow qui évalue votre température ; le braque qui, lorsque vous êtes au volant, vous arrache d'un jappement à votre téléphone portable ; le fox qui vous alerte sur la désinformation pratiquée par certains « news » d'outre-Atlantique ? On peut même, à plus long terme, rêver d'un dalmatien... multitâche et, pourquoi pas, d'un basset chargé de rappeler à nos Premiers ministres l'existence de la France d'en bas ! En tout cas, voilà qui promet une nouvelle jeunesse à l'expression « Merci mon chien », dont on n'usait jusqu'ici que pour stigmatiser la politesse trop souvent rudimentaire de nos morveux... Cela dit — après s'être récréé quelque peu, un chroniqueur du langage se doit de reprendre le collier afin d'éviter à ses ouailles de tomber sur un os —, faudra-t-il remercier ledit chien des services ou pour les services qu'il nous rend ? La tradition et le langage soutenu s'accrochent, est-il besoin de le préciser, à la première solution. Mais la seconde a gagné du terrain au point de n'être plus aujourd'hui considérée comme incorrecte. Certains, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, vont jusqu'à déceler des nuances entre les deux emplois. Robert réserverait volontiers le pour au concret, l'abstrait restant chez lui l'apanage du de : c'est ainsi que vous vous verriez remercier de votre hospitalité, mais pour votre cadeau. Claude Duneton, de son côté, préfère voir dans l'utilisation du pour une insistance, un renforcement de la gratitude : merci bien et merci beaucoup, constate-t-il avec juste raison, s'accommodent mal du de. Dans ce cas, merci, cher lecteur, de l'intérêt que vous portez à notre langue... et merci plus encore pour cet empressement à nous retrouver dans ces colonnes un mardi sur deux. Notre prochaine rubrique sera (déjà) la deux centième !