Vous avez dit correction automatique ?

Un petit clic... mais quel choc !

< mardi 4 mai 1999 >
Chronique

On vit décidément une époque formidable ! Plus n'est besoin — et les élèves d'aujourd'hui ne se font pas faute d'ébruiter l'heureuse nouvelle — de transpirer sur les règles du Bled puisque, au bout du compte, le vérificateur orthographique assumera cette tâche à notre place... La brochure que le C.N.E.D. (Centre national d'enseignement à distance) consacre à l'Apprentissage de Word 97 par la pratique est sans équivoque : dans un premier temps, c'est « au kilomètre » que doit s'opérer la saisie. « La méthode, y lit-on, un brin admiratif, est la même que celle du sprinter, vous baissez la tête et vous tapez. » On ne vous demande pas de vous abstenir soigneusement de toute réflexion, mais chacun comprend que ce n'en serait que mieux. Le moment de « cliquer » sur orthographe viendra bien assez tôt ! Le résultat s'étale, sous vos yeux émerveillés, dans notre colonne de droite. Résultat très partiel, au demeurant, une lecture rapide de ladite brochure nous ayant permis d'y repérer quelque deux cent cinquante fautes du même genre. Le correcteur a-t-il vraiment été sollicité ? Le comble serait qu'il ne l'eût pas été, au sein d'un ouvrage censé nous familiariser avec lui ! Encore faut-il en bien connaître le maniement (certaines des erreurs recensées ci-après auraient dû être corrigées par un logiciel comme Word), et surtout les limites. Dès qu'il s'agit de distinguer entre les homonymes, en effet, la mécanique s'enraie : la mollette (sic) de la souris n'empêche pas la machine de dormir, puisque l'adjectif mollet prend bien deux t au féminin. Les coquilles les plus grossières ne la réveilleront pas davantage, pour peu que le mot existe : « Pou obtenir de l'aide », « cliquez su le bureau » passent comme une lettre à la poste. On nous dira que nous n'avons rien inventé, que tout le monde sait cela. Au vu de ce qui suit, il est à craindre, au contraire, qu'on ne le répète jamais assez, si l'on veut que nos enfants, que l'on sait naturellement économes de leurs efforts, ne soient pas tentés de faire leur cette maxime relevée dans la brochure incriminée : « Notre travail s'arrête là, le reste, Word va s'en charger ! »