Noms d'oiseaux
À l'heure de prendre la route et d'affronter les juillettistes sur le retour, ceux-là peuvent toujours servir... Et qui, mieux que le prédestiné et si bien nommé Pierre Merle, pouvait leur consacrer un ouvrage ? C'est à présent chose faite, en tout cas, avec ce succulent Petit traité de l'injure, récemment paru aux éditions de l'Archipel. Quand vous seriez — ce qu'évidemment nous vous incitons à rester — le (la) plus pacifique des non-violent(e)s, vous n'en seriez pas moins séduit(e) par la cocasserie de cette « encyclopédie de la grossièreté et de la muflerie », que corse encore le trait insolent du dessinateur Rémi Malingrëy. De la « robuste » à la « gentillette » en passant par la « savante », la « pittoresque », voire « l'exotique », vous saurez tout de l'injure, aujourd'hui et à travers les âges. Vous n'accuserez plus le coup si vous vous faites traiter de « face de clip », autrement dit d'imbécile heureux. Vous n'aurez que l'embarras du choix pour répliquer, entre la moderne xérox (sorte de clone d'une autre personne, en nettement plus pâle), la déjà ringarde seize K (de mémoire vive, autant dire pas grand-chose), et la branchée prise de tête, censée s'appliquer à toute personne « un peu emm... sur les bords ». Et pour le cas où vous n'en auriez pas l'usage, l'occasion n'en serait pas moins belle de vous replonger dans les grands classiques, au premier rang desquels on aura deviné Léon Bloy, Céline et, bien sûr, l'inévitable capitaine Haddock ! Un petit monument d'irrévérence et de création verbale, qui méritait bien d'être érigé par les temps aseptisés et volontiers « politiquement corrects » qui courent...
Petit traité de l'injure, par Pierre Merle (éd. l'Archipel). Dessins de Rémi Malingrëy. 264 p., 17,95 €.