Orthographe :
chassez la dictée,
elle revient au galop !

< dimanche 22 janvier 2023 >
Chronique

De même que l'on s'intéresse à la philosophie une fois l'an, le premier jour des épreuves du baccalauréat, on reparle d'orthographe à chaque évaluation, nationale ou internationale, pour constater que le niveau a baissé.

D'abord, comme il se doit en bonne pédagogie, soulignons le point positif de l'affaire : nous ne sommes plus dans le déni. Il fut en effet un temps, pas si lointain, où l'on voulait nous faire croire qu'en dépit des apparences « le niveau montait ». Il montait dans les autres matières (présumées plus importantes), ce qui ne saute plus aux yeux, nos chères têtes blondes, brunes, blacks et beurs peinant tout autant sur le front, visiblement sans bosse, des maths. Mais montait aussi en français, les calculs ne tenant pas compte d'une scolarisation autrement importante que sous la IIIe République. Plus personne ne conteste aujourd'hui que l'aiguille oscille entre le grave et le désespéré, et c'est déjà ça : pour s'attaquer au problème, il faut avoir reconnu son existence !

Amusons-nous ensuite de notre versatilité. Pendant des décennies, la dictée a été présentée par nos docteurs des sciences de l'éducation comme un exercice devenu obsolète et inefficace, qui ne pouvait séduire que les passéistes et les sadiques. Tout a même été fait, inspection à l'appui, pour dissuader les enseignants récalcitrants d'y avoir recours. Et ne voilà pas que le ministre de l'Éducation l'érige en panacée, prônant son retour quotidien au CM1 et au CM2 ! De quoi faire sourire quiconque n'aurait pas envie de pleurer...

Chacun, enfin, jusques et y compris la première dame de France, y va de son gadget pour redresser le cap. Sans voir que l'essentiel réside sans doute moins dans la méthode que dans l'état d'esprit. Commençons par réhabiliter la valeur travail et la notion d'effort. Par admettre que tout ne peut être placé sous le signe du ludique, si souhaitable soit-il, et qu'il faut bien, à un moment ou à un autre, se résigner à apprendre.

Par rappeler aussi que, si tout part bien de l'école, tout n'en dépend pas pour autant. Si notre société se montrait plus exigeante, plus attentive au détail, plus encline à affronter la difficulté plutôt qu'à l'éluder, nul doute que notre jeunesse, par contagion, se sentirait plus concernée par la nécessité d'une communication plus précise et mieux maîtrisée. Mais cela supposerait que chacun, à sa place, se remît en cause, ce qui n'est pas gagné.