Après l'autotest, va-t-on avoir droit
à un « autovaccin » ?

< dimanche 16 janvier 2022 >
Chronique

Un lecteur s'agace d'entendre un peu partout, et quasiment sur l'air des lampions : « Vaccinez-vous ! » Ce n'est pourtant pas, il s'en faut, qu'il fasse partie de ces antivax que le président dit vouloir emmerder jusqu'au bout...

Manifestement, le fond l'agace moins que la forme : il se serait plutôt attendu, pour sa part, à un « Faites-vous vacciner ! » Force est d'avouer que la logique n'en eût pas outre mesure souffert, le commun des mortels comme le ministre de la Santé (on se souvient de ce téton caché qui avait fait jaser dans les chaumières) en étant toujours réduits — « à date » comme on dit dans les milieux branchés — à faire appel à la main secourable (mais inflexible) d'un tiers !

Gageons qu'il se trouvera plus d'un complotiste pour nous expliquer que cette insulte au bon sens, plus encore qu'à la grammaire, entre dans un plan de communication des plus machiavéliques. Recourir au verbe « faire », ce serait en effet limiter notre autonomie, laisser entendre que nous ne sommes pas pleinement acteurs de notre devenir, reconnaître que cette vaccination nous est imposée (et administrée) de l'extérieur. « Se vacciner » est, au contraire, une affaire entre soi et soi : nous sommes l'alpha et l'oméga du processus, le delta et l'omicron n'apparaissant plus que comme des comparses sur lesquels la tenaille de notre fermeté est appelée, inexorablement, à se refermer !

Pour ne pas avoir à se prononcer ici sur cette vision orientée des choses, le chroniqueur de langue se hâtera d'émettre une autre hypothèse : peut-être a-t-on voulu éviter en haut lieu qu'une bérézina orthographique ne vînt s'ajouter au chaos sanitaire. Fût-ce pour une mauvaise raison (il est à craindre en effet que l'usager ne le fasse surtout en pensant que l'accord du participe passé est automatique en présence de l'auxiliaire être, ce qui est faux), on peut raisonnablement s'attendre que l'on écrive « elle s'est vaccinée », « ils se sont vaccinés ». En revanche, à combien de « elle s'est faite vacciner », « ils se sont faits vacciner » aurions-nous eu droit, alors que l'invariabilité du participe de faire est de rigueur quand suit un infinitif ?

Allez, on va faire semblant d'y croire... Ne serait-ce pas le signe qu'en dépit des temps apocalyptiques que nous traversons ceux qui nous gouvernent restent attachés au « bien-dire » ? C'est qu'il est encore permis de rêver, non ?