Haut-commissaire :
un trait d'union à déclarer absolument !

< dimanche 29 décembre 2019 >
Chronique

Le chroniqueur de langue laisse à des confrères plus qualifiés que lui le soin d'établir si les « oublis » de Jean-Paul Delevoye étaient crédibles et si sa faute, avouée et réparée, méritait ou non d'être pardonnée.

Ledit chroniqueur se sent plus à l'aise quand il s'agit de statuer sur une autre faute, à savoir l'omission du trait d'union au sein du vocable intéressé. D'aucuns se seront en effet demandé pourquoi le français conviait, dans les colonnes de ses divers dictionnaires, des hauts fonctionnaires (sans trait d'union) en même temps que des hauts-commissaires (avec). La réputation d'arbitraire dont souffre depuis toujours la langue de Molière ne serait-elle donc que trop fondée ?

Que nenni ! Les gardiens du temple auront tôt fait d'expliquer que, si haut fonctionnaire est un terme vague s'appliquant à nombre d'agents publics investis d'importantes responsabilités, haut-commissaire est un titre qui correspond à une fonction précise, ponctuelle et exercée dans un cadre défini. Voilà qui justifie la présence du trait d'union ici, son absence là !

Dont acte. On espère seulement que la publicité faite récemment au haut-commissariat n'encouragera pas l'usager à user du trait d'union dès que l'on prend de l'altitude : rappelons au passage que haut lieu, haut plateau et haute couture s'en passent !

Mais un autre doute nous assaille soudain : s'il est entendu que le pluriel est hauts-commissaires, haut étant donc considéré comme un adjectif variable, qu'en est-il du féminin ? Si surprenant que puisse paraître un accord qui se ferait en nombre, mais pas en genre, Larousse comme Robert semblent bien considérer que la forme est la même pour hommes et femmes, le dernier nommé faisant mention de « la haut-commissaire aux droits de l'homme ». On entend d'ici pester une gent féministe prompte à insinuer que, plus ces dames tutoient les sommets de la hiérarchie, plus elles peinent à rester visibles ! La presse semble d'ailleurs s'être rendue à ses arguments, faisant plus souvent qu'à son tour de Michelle Bachelet une « haute-commissaire des Nations unies ». À moins qu'il ne s'agisse là d'un de ces flous artistiques dont nos lexicographes ont le secret : comment expliquer en effet, que, dans le Petit Robert encore, la Haut-Alpine côtoie la Haute-Pyrénéenne ? Question de latitude, peut-être ?