Après le politicien défait, la terre battue...

C'est reparti pour un court !

< mardi 3 juin 1997 >
Chronique

Quand paraîtront ces lignes, tout le monde saura qui, de la majorité ou de l'opposition, aura finalement mordu la poussière. Mais il est à craindre que déjà nos lecteurs ne s'intéressent à d'autres revers, ne se passionnent pour d'autres volées... C'est que les Français, s'ils n'aiment guère — la dissolution l'a montré — qu'on les prenne au dépourvu, ne détestent pas, pour peu que la saison s'y prête, être pris de court ! Nous n'entendons pas ici ajouter aux souffrances de ceux qui, allergiques au sport, se sentent un peu « paumés » pendant les quinze jours que dure le tournoi de Roland-Garros (rien que de très normal, au demeurant, tennis ayant d'abord désigné, en anglais, le jeu de paume) ; tout au plus nous extasier devant certains échanges que vous ne verrez pas à la télévision. Sait-on toujours, par exemple, que ce mot tennis, aux allures si britanniques, est en fait un emprunt à notre impératif tenez, que l'on prononçait jadis « tenetz » ? Telle était en effet, si l'on en croit Alain Rey et son Dictionnaire historique de la langue française, l'exclamation dont usait le joueur de paume au moment de servir la balle. Était-on poli, à cette époque ! De même, ce court autour duquel s'agglutine aujourd'hui tout ce que notre société compte de personnages en vue devrait beaucoup à notre... cour de ferme avant que celle-ci ne perdît son t, probablement sous l'influence du latin médiéval curia. Force est ici de le constater : si, dans les deux cas, le service fut français (quoi qu'on en dise, les Anglais n'ont pas toujours tiré les premiers), le retour, incontestablement gagnant, fut britannique. Voilà qui, malgré tout, devrait ôter leurs complexes aux commentateurs — mais si, il y en a ! — qui préfèrent la marque au score, la manche au set et le jeu décisif au tie-break. Autant d'efforts à encourager : le temps n'est pas si lointain où, tendant les raquettes pour nous faire fesser, nous forgions nous-mêmes sans vergogne les anglicismes qui nous faisaient défaut... Est-il besoin de rappeler, en l'occurrence, que tennisman et tenniswoman n'ont jamais eu cours outre-Manche, le terme anglais étant en réalité... tennis player ?