Quid du référendum ?

Ne perdons pas notre latin...

< mardi 19 septembre 2000 >
Chronique

L'a-t-on assez répété ? Le citoyen d'aujourd'hui s'enflamme plus volontiers pour le prix de l'essence que pour le quinquennat : le référendum qui s'annonce ne semble pas captiver les foules et, s'il faut en croire les sondages, les Français risquent fort de lui préférer, le dimanche 23 septembre, le jeu autrement séduisant du... « ni oui ni non » ! Grâces soient en tout cas rendues au président Chirac de nous avoir fourni là l'occasion de souligner la place que garde le latin dans notre lexique. C'est secret de Polichinelle pour le référendum en question, dont les accents, conseillés plus qu'obligatoires, ne suffisent pas à masquer les origines : l'expression, utilisée surtout dans le domaine juridique à partir du XVIIIe siècle, nous vient, comme sa terminaison l'indique, du gérondif latin ad referendum, « pour en référer ». Mais qui s'avise encore, terminaison ou pas, de l'ascendance latine d'accessit (de la formule accessit proxime, « il s'est approché le plus près » du prix) ; d'agenda (littéralement « choses devant être faites ») ; de cancan (prononciation à la française de quamquam, « quoique », conjonction fréquemment utilisée, jadis, dans les disputes d'école) ; de déficit (à l'accent près, « il manque ») ; d'intérim (en latin, « pendant ce temps ») ; de quolibet (ablatif de quilibet, l'intéressé s'étant affranchi de l'expression disputationes de quolibet, « discussions à propos de n'importe quoi » ? Jusqu'à notre moderne fax, si décrié par les puristes, qui remonte au fac simile des Romains (« fais une chose semblable ») ! Langue officiellement morte, le latin est, on le voit, bien vivant dans nos phrases de tous les jours, et ce souvent à notre insu. De quoi raviver l'amertume de ceux qui déplorent sa quasi-éviction de l'école, au nom de la prétendue nécessité de « vivre avec son temps ». Mais vivre avec son temps, n'est-ce pas d'abord être en mesure de comprendre les mots dont on use ? Est-il vraiment indifférent de savoir que les urnes étaient, primitivement, de grands vases à l'aide desquels on puisait de l'eau ? Voilà au contraire qui pourrait nous dissuader, dimanche, de leur faire... cul sec !