Le livre du jour

LE BIDONNEUR

par Pierre Merle
Éditions e-dite
208 p., 18 €

N'en faisons pas mystère : nous avons d'abord lu le roman parce qu'il portait la griffe de Pierre Merle. Pour quiconque fait profession de s'intéresser à la langue — nous devrions dire aux langues tant, de l'argot au français précieux en passant par le verlan des cités, se révèle étendu le rayon d'action de l'intéressé —, cela tient du devoir. Il suffit toutefois de quelques pages pour que, oublieux de ce qui nous amène, nous ne goûtions bientôt plus qu'au plaisir, devenu trop rare, d'une lecture sans arrière-pensées. Verve et gouaille sont, on ne s'en étonnera guère dans ce contexte très parisien, au rendez-vous. On ne s'étonnera pas davantage de la justesse de la satire : l'auteur, qui a été journaliste, connaît à merveille son monde et les ficelles du métier. Le miracle est qu'il parvient à la rendre aussi tendre qu'impitoyable. On ne s'attendait pas nécessairement, en revanche, à cette intrigue bien ficelée, laquelle ne livre ses secrets que dans les ultimes pages. À ces personnages secondaires, surtout, joliment campés, et qui, du trottoir au zinc, évoquent irrésistiblement ceux du pourtant inimitable René Fallet.

À la différence de Frédéric, plumitif à Scoop Hebdo, Pierre Merle, quand il s'essaie au roman, ne « bidonne » pas. Il peut prétendre, heureusement pour lui, à un tout autre destin littéraire que son héros.