Premier anniversaire
de la convention de partenariat
entre EDF et le groupe ALPHA
Locaux d'EDF à Hazebrouck, 27 avril 1990
Monsieur le Directeur,
Quand vous avez fait part à notre secrétaire Jacques Messiant de votre intention de célébrer le premier anniversaire de la signature de notre convention, j'ai été à la fois ravi et surpris.
Ravi car, est-il besoin de le rappeler, l'accueil qui nous a été réservé l'an dernier dans ces mêmes murs restera, dans notre mémoire collective, comme l'un des plus chaleureux de toute l'histoire d'ALPHA. On s'est aperçu ce soir-là que l'installation des petits fours était décidément une spécialité d'EDF. Quant à l'affluence, elle a battu, on s'en souvient, tous les records, tant en quantité qu'en qualité : ce soir-là, c'est tout le gratin qui s'est penché sur nos croûtes (j'espère que les peintres me pardonneront celui-là, sinon c'en est fait de ma présidence) et je reconnais bien là, du reste, le flair de notre « manager », lequel avait programmé la fête à quelques semaines des élections. Une période où, on le sait, les absents ont tort plus encore que d'habitude...
Ravi, donc, de pouvoir prouver à nos témoins hazebrouckois qu'un an après notre mariage, l'entente demeure parfaite et qu'en dépit des aquarelles qui ont inondé vos murs depuis lors, il n'y a toujours pas d'eau dans le gaz !
Ravi, et en même temps un peu surpris, pour ne pas dire inquiet. D'abord parce que tout cela risquait de sentir un peu le réchauffé et qu'il ne faudrait pas, cette fois, que nous mettions à côté de la plaque ! Ensuite parce que, pour une entreprise aussi moderne et sophistiquée qu'EDF-GDF, cela pourrait paraître anachronique — pour ne pas dire ringard ! — de passer son temps à souffler des bougies. Voilà qui s'accorderait mal, en tout cas, avec cette image de dynamisme qu'a su imposer M. Le Morvan depuis son arrivée à Hazebrouck, un homme qui a pour règle d'investir dans l'avenir beaucoup plus que dans le passé et d'élargir sa sphère d'influence plutôt que de camper stérilement sur ses positions. Car M. Le Morvan ne vise pas, qu'on se le dise, la seule clientèle des cadres. Il est aussi en phase avec les établissements les plus câblés de la ville (j'ai nommé les Collège et Lycée des Flandres, et je m'empresse de préciser que si je pèche ainsi par immodestie, c'est tout simplement parce que M. Beaumont, proviseur, se trouve dans la salle et qu'il me faut bien aborder, dans les meilleures conditions possible, l'époque de la notation administrative). Plaisanterie mise à part, chacun sait, car les gazettes s'en sont récemment fait l'écho, que les établissements précités collaborent avec EDF par l'intermédiaire de leurs BEP et BTS « action commerciale ». Mais M. Le Morvan ne dédaigne pas davantage la piste sportive. Il est de notoriété publique qu'il parraine le club de tennis local. D'ailleurs, depuis qu'EDF arrose la Tulipe noire, la fameuse pression chère à Noah a disparu des courts hazebrouckois : on n'y parle plus, désormais, que de tension, et je m'en réjouis car le français n'y perd pas ! J'ai lu également qu'EDF se proposait d'habiller l'équipe cadette de football de Bailleul. S'il lui reste quelques coupures — s'il lui reste quelques sous, plutôt, car parler de coupures à EDF un lendemain de grève, c'est un peu évoquer la corde dans la maison du pendu ! —, puis-je suggérer à M. Le Morvan d'équiper les stades de la région d'un système de contrôle vidéo : cela nous permettrait, sans vouloir naturellement remettre cela sur le Tapie, d'inviter régulièrement des arbitres belges et de donner un coup de pouce au tourisme local... Mais je précise bien « s'il lui reste quelques sous », car quand on a la chance d'avoir à sa porte une entreprise aussi performante qu'EDF-GDF, ainsi qu'un chef de subdivision aussi actif, il m'étonnerait fort que l'on ne pousse pas ladite porte plus souvent : j'entends d'ici les cyclistes affirmer que, depuis leur plus tendre enfance, ils en pincent pour les circuits... et les judokas mettre en avant leur connaissance des prises !
Autant de raisons pour lesquelles, si je m'en félicitais bien sûr, je m'étonnais de ce subit intérêt pour les commémorations. Mais je devais bientôt apprendre, par le biais de la superbe invitation que vous avez toutes et tous reçue, que M. Le Morvan faisait d'une pierre deux coups... Vous ne fêtiez pas seulement notre premier anniversaire de mariage (j'ai vérifié dans le Quid, cela s'appelle les noces de coton ; moi, allez savoir pourquoi, j'aurais préféré, vu les circonstances, que ce fussent les noces de ouate), vous nous invitiez en même temps à un baptême, celui d'« EDF-GDF services ». On reconnaîtra au passage votre prédilection pour le tennis et nul ne doutera qu'il ne s'agisse là de services gagnants !
Je dois toutefois à la vérité de préciser qu'à ALPHA, et en dépit d'un faire-part qui en viendrait presque à présenter la naissance comme le fruit de notre union (un an, les apparences sont sauves pour notre petite Flandre si conformiste !), nous n'y sommes pour rien. Quand bien même une tradition solidement établie voudrait qu'un artiste, ça fasse souvent l'enfant ; quand bien même M. le chef de la toute nouvelle agence Flandre-Lys nous décernerait, pour l'occasion, la flatteuse étiquette de « partenaire » (un terme dont on ne sait trop ce qu'il a tendance à signifier, à certaines heures, sur Canal +). En revanche, si nous ne pouvons prétendre au titre de parents, nous sommes très fiers, à l'occasion de ce baptême, de faire office de parrains. Trop heureux, aussi, si nos peintres et photographes ont pu donner quelques couleurs supplémentaires à un nouveau-né éclatant de santé, si nos auteurs ont pu ajouter quelques livres à son poids de naissance. Pour ma part, et à défaut de dragées, je me suis efforcé de vous livrer un discours tout sucre tout miel.
Notre bonheur n'est d'ailleurs pas, monsieur Le Morvan, dénué de toute arrière-pensée. Chacun sait bien qu'après les baptêmes viennent les confirmations. Sachez donc, monsieur le directeur d'agence, que pour toutes les communions (encore que nous préférions les solennelles aux privées) que vous pourriez être tenté de célébrer dans un proche avenir, vous avez, par avance, la bénédiction d'ALPHA.
Longue vie à « EDF-GDF services » !