La nuit américaine
(Mons-en-Barœul - 2012)
Décidément, notre cinéma a le vent en poupe : le soufflé d'Intouchables n'était pas retombé que la France s'offrait le luxe de passer, d'un seul coup d'un seul, au noir et blanc et du Noir au Blanc ! Changeant d'idole, ne s'est-elle pas déniché un Omar à l'américaine en la personne de Jean Dujardin, ce grand méchant Loulou devenu tout à coup l'un de ses chouchous ? Devant l'improbable succès de cette bluette désuète, — que de bravos, que de vivats l'ont saluée ! —, il n'y a pas que les chtis, en effet, qui se soient dits cois : la planète tout entière a craqué. Combien de césars, d'oscars et autres trophées du septième art ont été raflés ! Quelle unanimité dans l'éloge appuyé, voire dans le panégyrique !
Surtout, l'antiaméricanisme supposé de l'Hexagone a fondu comme neige sous les sunlights devant l'hommage que la gent hollywoodienne aurait rendu, sinon au pays des philosophes, du moins à celui des Lumière. Dès potron-minet, les étranges lucarnes ont retransmis les images chocs de cette apothéose sans précédent. Et quel bonheur ce fut d'entendre, par le biais d'un « Putain, quel pied ! » aussi tonitruant que raffiné, résonner enfin la langue de Molière parmi les ors californiens ! Se trouvaient par là même vengés nos frites, lâchement boycottées au temps de la guerre d'Irak, et nos grands crus qui, sans ménagement, s'étaient alors vu apprendre le caniveau...
Certes, plus d'un atrabilaire tatillon susurrera qu'en l'occurrence les Yankees aspiraient avant tout à s'encenser eux-mêmes ; que, quelque émouvant qu'il fût, ledit hommage aux pionniers de la pellicule allait moins à notre Max Linder qu'à leur Mack Sennett ; que, si notre langue trouvait soudain grâce à leurs yeux, c'est que stricto sensu le muet nous l'avait fait avaler : nul besoin, pour une fois, de sous-titres ! Que tous ceux, donc, qui céans font profession de bruiter, de panoter et de postsynchroniser ne s'illusionnent ni ne bâtissent des studios en Espagne : la récré est derrière nous, et il est à craindre que l'on n'ait pas fini, de ce côté-ci de l'Océan, de cultiver son Dujardin !
TEST
Juniors et seniors amateurs écriront sans se tromper les titres de films suivants :
- Ascenseur pour l'échafaud, Comment épouser un millionnaire, La Gifle, Le Guépard, Le Toboggan de la mort (fin pour les juniors) ;
- Les Bootleggers, La Carapate, Classe tous risques, Le Frère le plus futé de Sherlock Holmes, Le Mécano de la « General » (fin pour les seniors amateurs) ;
Les seniors professionnels se demanderont de surcroît, au terme de ce texte qui se voulait un hommage au muet, si les noms qui suivent ont pour initiale un « h » muet ou un « h » aspiré et, par voie de conséquence, de quel article défini il convient à chaque fois d'user :