Mes sorciers bien-aimés

(Comines - 2009)

Les temps changent. Hier, on les écartelait ; aujourd'hui, on se les arrache. On les brûlait autrefois, à la faveur de gigantesques autodafés censés apaiser le courroux divin, sur les bûchers de l'Inquisition ; ils flambent désormais en librairie, faisant surtout bouillir la marmite d'éditeurs bien aises de gagner des mille et des cents. Minuit, quelquefois passé d'une minute, était jadis l'heure glauque où la plupart d'entre eux s'adonnaient à de méphistophéliques sabbats ; c'est souvent celle, à présent, où leurs adeptes, quasi envoûtés, vont pieusement recueillir le dernier grimoire qui célèbre leurs exploits. Sorcières et sorciers ont une cote d'enfer, on vous dit !

Force est de reconnaître qu'eux aussi ont bien changé... Quel gouffre entre la noirâtre marâtre de Blanche-Neige, qui exhibait tous azimuts son rambour joliment rembourré, et l'héroïne, craquante et à croquer, d'Un amour de sorcière ! Ne se damnerait-on pas pour celle-ci quand celle-là ne nous inspirait que cauchemars psychédéliques ? Quel abîme entre le vieillard cacochyme qui, d'une dextre tremblotante, versait sa poudre de perlimpinpin dans le chaudron de cuivre et ce binoclard ébouriffé que l'on eût cru plus familier du joystick que du manche à balai, mais qui draine dans son sillage quelque quatre cents millions de lecteurs sous le charme !

Seule reste à enjôler la gent orthographique, laquelle répugne à se laisser mener à la baguette, fût-elle magique. C'est que pour de tels zèbres la langue, n'en déplaise à ce pamphlétaire en mal de zéro faute, n'a rien de sorcier ! Pourtant, enclins qu'ils sont à enrichir leur vocabulaire, ils ne baveront jamais sur l'alyte ou le pélodyte. Y regarderont toujours à deux fois avant de repousser un napel du pied. Quant à l'achillée sternutatoire, on comprendra que les atchoums qu'elle provoque résonnent plus agréablement à leurs cochlées que ceux, fatals prodromes, de l'influenza. Il se peut donc que la jettatura leur siée, coquin de sort ! La preuve, c'est qu'ils sont ici.

 

TEST

Les candidats devaient bien s'attendre, vu le thème choisi, qu'on leur jetât des sorts !

- absorption, essor, hareng saur, réassort, ressortir (fin pour les juniors) ;

- désassortiment, extrasensoriel, perce-oreille, psoriasis, tussor (fin pour les seniors amateurs) ;

essoriller, massorète, psychosensoriel, sanguisorbe, sorite (fin pour les seniors professionnels).