Le dictionnaire :
traduction, voire trahison du monde ?

Assemblée nationale,
Paris, 20 mars 2015

Ma mission, si je l'accepte (et je crois qu'à ce stade je n'ai plus guère le choix), consistera à faire oublier à l'aimable assistance que le titre fourni dans l'urgence à Jean Pruvost — lequel me disait, dans son courriel, devoir faire imprimer le programme au plus vite —, a été arrêté (horresco referens !) avant que je n'aie un peu sérieusement réfléchi au contenu de ma communication. À masquer du même coup l'angoisse qui est à présent la mienne devant un intitulé (Le dictionnaire : traduction, voire trahison du monde ?) dont la vastitude me condamne à la bravitude (ça, c'est pour le coup où Ségolène viendrait à patrouiller dans les parages : à l'Assemblée, on n'est à l'abri de rien !). Ajoutez à tout cela le complexe qui est le mien à l'heure de m'exprimer devant un tel parterre de docteurs ès lexicographie, dictionnairique et lexiculture réunies (j'aurai au moins retenu ces distinguos du jouissif pavé du susnommé Pruvost), et vous aurez une pâle idée des spasmes auxquels se trouve exposé, en ce moment même, le côlon de votre serviteur.

Heureusement, je me suis rappelé fort à propos que la règle du jeu consistait ici à ne point aller au-delà des vingt minutes et que, partant, tout ce que je n'aurais pas dit sur le sujet a une chance d'être porté au crédit d'une concision subie mais pleinement assumée. C'est d'autant plus réconfortant que mon statut de compétiteur m'a longtemps condamné à être, sinon l'homme d'un seul dictionnaire, du moins de deux : le Petit Larousse illustré et le Petit Robert puisque, je l'ai expliqué l'an dernier je crois, ces deux-là, dans leur ultime édition s'entend, étaient nommément désignés par l'organisation des championnats d'orthographe comme les seuls dignes de foi. Inutile, donc, de préciser que ce qu'attendent d'un dictionnaire des illuminés dans mon genre, c'est bien davantage un code qu'une interprétation. Peu nous chaut que ce code s'abreuve plus souvent qu'à son tour à la source intarissable de l'arbitraire, quelquefois même (et je pense là aussi l'avoir démontré l'an dernier) à celle de l'erreur franche, tout ce qui compte à nos yeux, c'est que le dictionnaire dicte avec netteté sa loi, celle-ci dût-elle être scélérate. Disons-le sans ambages, quand je devrais par là faire bondir certains de mes pairs, le sectateur de Pivot n'est pas un démocrate. Il n'est pas Charlie. Il est prêt à plier sous n'importe quel joug, à passer sous n'importe quelles fourches caudines dès lors qu'elles lui sont clairement indiquées. Rien ne l'indispose autant qu'un pouvoir tiède qui, au nom de je ne sais quelle conception humaniste, laisserait au citoyen des mots une certaine liberté de manœuvre. Sauf, bien sûr, quand il s'est trompé et qu'il trouve dans les à-peu-près de la législation de quoi se dédouaner a posteriori et contester la décision du jury ! Un code, donc. Une bible. Pour nous, le dictionnaire n'est pas quelque chose d'humain, il est nécessairement de l'ordre de la transcendance. Pour un peu, nous serions prêts à l'adorer comme le fétiche arumbaya de L'Oreille cassée. C'est dire si j'ai lu et quelquefois relu ces passages du Dico des dictionnaires de mon ami Pruvost qui m'apprenaient ce qu'au fond je pressentais depuis longtemps mais n'avais jamais voulu laisser affleurer, à savoir que derrière cet objet saint il y avait des hommes, avec tout ce que cela suppose de faiblesses, de partis pris, et à l'occasion même de mesquinerie.

Je vais tout de même tenter de justifier ce titre pompeux, pour ne pas dire pompier. Il est né d'un rapprochement entre le dictionnaire monolingue, qui nous occupe essentiellement aujourd'hui, et son confrère bilingue. On a coutume de dire en effet, et ce sont nos amis italiens qui de loin le disent le mieux, par la grâce d'une paronomase : « Traduttore, traditore » (excusez la prononciation, et souvenez-vous que celui qui parle est un Flamand, rose de confusion d'ailleurs, mais ce n'est pas une raison pour lui mettre un « t »). Le traducteur est un traître. Passer d'une langue à une autre ne peut se faire qu'au prix d'incessants renoncements, de compromis, voire de compromissions. J'entendais seulement rappeler pour ma part que le dictionnaire monolingue, quand bien même on s'en méfierait moins puisque, a priori, il n'a pas à franchir la redoutée barrière de la langue, n'était pas davantage à l'abri de l'interprétation, de la subjectivité. Parce que je ne dispose ni de la bibliothèque, ni surtout de la culture encyclopédique d'un dicopathe comme Jean Pruvost, parce que, aussi, ce serait souvent enfoncer des portes ouvertes après la démonstration qu'en ont faite des spécialistes autrement armés que moi, je ne vous ferai pas l'injure de rappeler qu'un dictionnaire est tributaire des préjugés de son époque. Particulièrement éclairante et croustillante est, à cet égard, l'image de la femme à travers les âges du dictionnaire. Je bornerai pour ma part ma démonstration au seul cadre synchronique et volontairement réducteur que j'évoquais tout à l'heure, à savoir nos deux dictionnaires usuels d'aujourd'hui. C'est à se demander quelquefois si leurs auteurs vivent sur la même planète !

Jugez-en plutôt. Dans ce pays de m... où les arbitres, au propre comme au figuré, n'arrivent pas à la ceinture de Zlatan mais où, surtout, la baguette partage avec le béret basque la fonction d'étendard, il n'apparaîtra anecdotique à personne que cette dernière soit rassie chez Robert, rassise chez Larousse. On ne va pas se balancer des pains pour si peu, mais quand même ! De la même farine — enfin, si j'ose dire — et parce que la France a été aussi décrite à maintes reprises comme un grand plateau de fromages, comment rester insensible au fait que le saint-marcellin, le saint-nectaire, le saint-paulin soient invariables chez Larousse, et qu'ils prennent un « s » quand on change de crémerie ? Vous me direz, bonnes pâtes que vous êtes, que c'est là une aubaine pour le compétiteur, lequel sait en effet que le jury n'aura d'autre solution que de se montrer coulant... Il n'empêche que cela fait désordre ! Peut-être, m'objecterez-vous, la réconciliation se scellera-t-elle autour d'un verre, comme il sied à un pays que l'on célèbre partout pour ses crus ? Peut-être, oui, pourvu que ce ne soit pas avec un blanc de blanc(s). C'est pour le coup que la coupe serait pleine, puisque celui de Larousse prend un « s » alors que celui qu'on sert chez Robert n'en prend pas. Ne pas être fichu de s'entendre sur la graphie de nos champagnes, vous admettrez avec moi que cela devrait valoir à nos lexicographes un zéro pointé... Que dis-je ? Une bulle, eu égard au contexte ! Mais ce ne sont là que quelques exemples parmi de nombreux autres, et qui dépassent de beaucoup, il va sans dire, le cadre étroit des nourritures terrestres. Sur le terrain du sport, il y a aussi à boire et à manger. Larousse confesse par exemple une admiration sans faille pour nos Bleus, lesquels ont chez lui droit à la majuscule. Robert, lui, ne s'est probablement pas avisé qu'on était les champions, et ce depuis 1998, puisqu'il les prend toujours pour des bleus avec une minuscule, ce qui, vous l'avouerez, est infiniment moins flatteur. Mais que dire des jeux Olympiques, censés célébrer l'universalité ? L'essentiel, dans ce domaine où l'ombre du baron de Coubertin se devine encore, n'est visiblement pas de fixer une norme, mais plus modestement de participer. Chez Larousse, le « j » est minuscule, le « O » majuscule. Chez Robert, c'est précisément l'inverse : « J » majuscule et « o » minuscule ! La médaille de l'unanimité, ce sera pour une autre fois... Et n'allez pas chercher dans le détail de telle ou telle épreuve de quoi vous consoler : vous risqueriez d'y découvrir que le saut se fait à ski chez Robert, à skis chez Larousse. À vous de déterminer celui qui est... hors piste(s) !

Tout cela vous titille ? Attendez : vous titille au sens de Larousse ou au sens de Robert ? Car si, pour ce dernier, ladite démangeaison est toujours légère et agréable, elle peut aussi, pour le premier nommé, se révéler énervante... C'est que les graphies ne sont pas seules en cause, les sens peuvent varier tout autant. Vous hésitez depuis toujours entre le coordinateur (avec un « n ») et le coordonnateur (avec deux) ? Ne comptez pas sur nos frères ennemis de la lexicographie pour vous indiquer le bon choix pour la France, comme l'aurait fait le Giscard de 1978. Larousse nous explique que coordonnateur est un terme administratif. Comprenez par là, ou je ne sais plus ce que péjoratif veut dire, qu'il vaut mieux le cantonner dans ce domaine pas forcément fiable, où l'on n'hésite pas à commencer ses lettres par un discutable « Suite à votre honorée du tant... » et où l'on candidate à tour de bras... Oui mais, chez Robert, c'est coordinateur qui est montré du doigt, comme un infiltré qui nous viendrait de la perfide Albion ! Ce qu'il manque décidément à nos dictionnaires, c'est un coordonnateur. Ou un coordinateur, c'est comme on le sent, finalement !

N'attendez pas plus de consensus dans un domaine scientifique dont (des plus naïvement je vous l'accorde) j'avais d'abord pensé qu'il prêterait moins le flanc à la subjectivité : au collisionneur de hadrons de Larousse répond en effet le collisionneur d'hadrons de Robert (le « h » est ici muet alors que de l'autre côté il est probablement... fumé), à la forficule de Larousse le forficule de Robert (au pis aller, vous pouvez continuer à traiter les intéressés de perce-oreilles, vous n'aurez d'états d'âme qu'au pluriel). Et si par extraordinaire tout cela était de nature à vous faire tomber dans les pommes, en termes plus galants à vous précipiter dans un coma vigil(e), sachez que ce vigil aurait un « e » chez Robert, et pas chez Larousse ! Elle n'est pas belle, la vie que l'on vous raconte dans les dictionnaires ? En tout cas, reconnaissez qu'elle est tout sauf répétitive et monocorde !

Il y en a qui rêvent d'une banque (vous connaissez la suite), moi je rêve d'un code de la route (cela arrangerait bien mon capital points) qui soit aussi ouvert et tolérant que notre code lexical : il ne faut pas dépasser 110 mais vous pouvez aller au-delà quand même... C'est ça qui serait le pied (je veux parler de celui dont vous vous servez pour écraser l'accélérateur) !

Ne comptez pas sur moi pour me lancer dans une théorie du genre qui ne pourrait être que scabreuse. Je ne sais que trop d'ailleurs, on nous l'a suffisamment expliqué, le regretté Maurice Druon en tête, que le genre grammatical n'a rien à voir, en français, avec le sexe. Quelle ne fut pourtant pas ma surprise de découvrir, il y a peu, que si l'hermaphrodite était chez Larousse un nom des deux genres (ce qui peut se concevoir, après tout, quand on songe au sens), il n'en allait pas de même de l'androgyne, toujours masculin. Je ne doute pas qu'il ne se trouve dans l'assistance des esprits suffisamment pointus pour m'expliquer que, de même que le pithécanthrope n'est pas la copie conforme de l'anthropopithèque, l'androgyne et l'hermaphrodite ne sont pas rigoureusement superposables. Il n'en reste pas moins que, pour l'étymologie, il y a plus qu'un air de famille ! Mais là où l'étonnement s'est mué en stupéfaction, c'est quand je me suis aperçu que c'était exactement l'inverse chez Robert : un ou une androgyne, mais forcément un hermaphrodite ! Étonnant, non ? aurait dit ce bon Desproges...

Il y a aussi des jours où l'on bénirait le ciel qui vous a fait naître chti. Ce n'est pas que l'orthographe de celui-ci fasse davantage l'unanimité : nous avons droit à l'apostrophe (ch'ti) chez Robert (et encore, depuis que le film de Dany Boon a connu le succès que l'on sait : les troupes d'Alain Rey ont dû penser qu'une apostrophe, ça ferait davantage biloute), mais toujours pas chez Larousse ! Non, c'est bien plutôt parce que chez nous comme en Belgique, le petit déjeuner est une conquête récente, qui n'est que partiellement entrée dans nos mœurs. Nous n'avons donc pas à nous demander comment l'écrire : sans trait d'union, à la mode Larousse, ou avec, chez Robert, il faut croire que chez lui c'est l'ami Ricoré qui l'a apporté. Et puisque je parlais tout juste de Dany Boon, je ne puis m'empêcher de songer à la Poste. Vous êtes-vous seulement avisés de ce que vous perdiez en parlant de RIP ou de RIB ? Sachez, gens de trop de foi, que le relevé d'identité postal est lui aussi à deux vitesses selon que vous vous fournissez chez l'un ou chez l'autre : pour Larousse, c'est le relevé qui est postal, d'où postal. Chez Robert, c'est l'identité qui est postale, d'où postale. Deux mondes, je vous dis !

Et n'allez surtout pas croire que cet inventaire vise à privilégier un dictionnaire par rapport à l'autre : j'ai toujours mis un point d'honneur, dans mes billets comme dans mes chroniques, à les déclarer, dans leur grandeur comme dans leurs faiblesses, ex aequo. Mais même ex aequo, ces deux-là trouvent le moyen de cultiver leur différence : ils sont certes d'accord sur l'invariabilité et sur le caractère superfétatoire de tout trait d'union, mais pour le reste l'un lie le « e » à l'« a » (ex æquo) et recourt donc à la ligature, c'est Robert. Larousse, à l'inverse, dissocie soigneusement les deux voyelles. À y perdre son latin, dans tous les sens de l'expression !

Je ne voudrais pas davantage que vous pensiez — à travers tous ces détails sur lesquels je viens d'ironiser un peu facilement, avec pour seule excuse l'espoir de vous arracher çà et là un sourire — que ces écarts sont toujours le fait de distractions, de coquilles, d'oublis. C'est vrai que je l'aurais un peu cherché puisque j'avais pris un malin plaisir, l'an dernier, à souligner que les dictionnaires ne cessaient déjà de se contredire eux-mêmes, d'une entrée à l'autre, d'une page à l'autre ! La vérité est qu'il y a bien des points qui sont moins anecdotiques, et qui trahissent, ceux-là, une authentique divergence de vues et de conceptions. Prenez par exemple les noms déposés. On sait que Larousse leur accorde systématiquement la majuscule et va jusqu'à l'exiger de l'usager. Le Robert, de son côté, la leur retire sans vergogne. Aucune volonté, croyez-le bien, ni là ni ici, de se singulariser à bon compte : les deux façons de faire se réclament en réalité du nécessaire hommage à rendre aux produits concernés. Larousse estime qu'il faut respecter la marque : sa majuscule entend rappeler que le mot appartient à son créateur, qu'il n'est donc pas à mélanger avec le vulgum pecus du lexique ordinaire. Chez Robert, on part au contraire du principe que ce qui peut arriver de mieux à un nom propre, c'est encore de devenir un nom commun. C'est en quelque sorte la preuve qu'il a réussi ! Et voilà pourquoi le Coton-Tige, la Cocotte-Minute et les Caddies se poussent ostensiblement du col chez Larousse, alors qu'ils ont tôt fait de redescendre sur terre chez Robert. Vous me permettrez d'avoir au passage une pensée émue pour la malheureuse socquette. Tous les candidats aux Dicos d'or vous diront qu'elle eut longtemps droit à la majuscule chez Larousse alors que, de la même façon qu'un chef se verrait soudain retirer son étoile au Michelin, elle s'en trouve privée aujourd'hui : je suppose que l'infortunée doit avoir le moral dans les chaussettes !

Voyez aussi la façon dont l'un et l'autre membre de notre éminent duo ont digéré la récente réforme de l'orthographe. Il y aurait en effet un livre à écrire sur la façon dont ils ont intégré les graphies nouvelles. Ou pas, comme on aime à dire aujourd'hui ! Larousse, visiblement peu emballé par ces Rectifications de 1990, a d'abord considéré qu'il était urgent d'attendre, et de les soumettre, comme l'avait d'ailleurs recommandé le secrétaire perpétuel de l'Académie française, à l'épreuve du temps. Sous la pression d'un environnement francophone autrement sensible que nous ne le sommes aux sirènes du renouveau, le Petit Larousse n'en a pas moins consacré quelques-unes de ses premières pages à un exposé global de la réforme et des formes modifiées, façon comme une autre de préserver l'avenir sans aller jusqu'à leur ouvrir toutes grandes ses entrées. Depuis 2012 je crois, c'est pourtant chose faite : les graphies nouvelles côtoient les traditionnelles, mais en sont encore séparées par un petit signe que, pour ma part — vous connaissez ma mauvaise foi ! — j'ai tendance à rapprocher de l'appréciation naguère délivrée par l'OCFC (Office catholique français du cinéma) : « Pour adultes avec réserves ». Le Petit Robert s'est montré d'emblée plus intéressé : il avait même, sur nombre de points, devancé l'appel. Je me souviens de m'être entendu dire par Josette Rey-Debove, alors qu'en 1995 je venais tout juste de reprendre la chronique de langue de La Voix du Nord (c'était au Carlton de Lille, ce qui prouve déjà que toutes les liaisons n'y sont pas forcément dangereuses), que de toute façon les puristes allaient tous mourir, et qu'ils ne seraient pas remplacés. Cela étant, la nouvelle orthographe s'y trouve davantage traitée au coup par coup : la pénétration est massive, par exemple, dans le secteur du pluriel des noms composés (ce n'est pas Jean-Pierre Colignon qui me contredira, lui qui peste régulièrement contre les gratte-ciels) ; infiniment moindre, et quelquefois nulle, dans d'autres domaines. On a la très nette impression que les rédacteurs du Robert font plus librement leur marché, quand bien même ils ne manqueraient pas de se réclamer du sacro-saint usage, eux aussi. Mais chacun sait que c'est un concept qui n'échappe pas totalement à la subjectivité, lui non plus ! Bref, entre un dictionnaire qui répercute la réforme de A à Z, c'est le cas de le dire, mais en s'armant de pincettes, et un autre qui se mouille davantage, mais selon des critères souvent connus de lui seul, on mesure mieux combien le code est toujours susceptible de s'enrichir d'interprétations diverses !

À une question qui a déjà beaucoup servi, à savoir « Quel livre emporteriez-vous sur une île déserte ? », l'académicien Erik Orsenna, que j'ai eu la chance de croiser sous la Coupole lundi matin, a un jour répondu : « Un dictionnaire. » On ne pouvait signifier avec plus d'élégance que, loin de toute civilisation — et quand bien même on penserait qu'il y a plus urgent à faire, dans cette solitude imposée, que de se soucier de la façon de communiquer — on n'en a pas moins, et peut-être plus que jamais, besoin d'un code pour se raccrocher aux branches de l'humanité. Je regrette seulement que la personne qui, à ce moment, lui tendait le micro n'ait pas été Jean Pruvost. Je ne doute pas un seul instant que, du tac au tac, il n'ait alors surenchéri : « Un dictionnaire, sans doute. Mais lequel ? »