Tous les chemins viennent de Rome...
mais passent par Londres !
Naguère, une rencontre opposant nos Dogues à Everton se matérialisait, sur le papier, en « LOSC-Everton ». De plus en plus, aujourd'hui, et tout particulièrement sur Canal +, cela devient « LOSC vs Everton ». Latin, pas mort ? Voire !
Ce « vs » (quand il ne s'agit pas d'un « v » seul, ou, tout aussi étonnant, d'un « vs. ») est en effet l'abréviation d'un mot latin signifiant « contre, opposé à ». Sauf erreur de notre part, le Dictionnaire d'une Académie française pourtant censée avoir des lettres ne lui a jamais ouvert ses colonnes, pas plus que le Trésor de la langue française. L'Officiel du Scrabble, prêt à tout pour permettre à ses ouailles de proposer un mot constitué de deux seules consonnes, n'est pas vraiment une référence en l'espèce. Que Robert et Larousse se montrent moins bégueules en recensant dans leur nomenclature ce paria de luxe a de quoi surprendre davantage. C'est néanmoins, si l'on en juge par les définitions qu'ils en donnent, pour le cantonner dans les sphères didactique et linguistique, auxquelles le grand public, on le sait, n'a que parcimonieusement accès.
Voir, en revanche, ce « vs » orner aujourd'hui une affiche de football nous fait irrésistiblement penser à Sganarelle, lequel, prenant exemple sur son maître Dom Juan, donnait de l'inter nos à son interlocuteur pour lui montrer qu'il était moins inculte qu'il n'en avait l'air. Si ce n'est pas là cuistrerie en bonne et due forme, chacun conviendra que cela y ressemble assez.
On nous rétorquera que nous ne savons décidément pas ce que nous voulons, que toute reviviscence de la langue de Cicéron est bonne à prendre, et que, tout bien pesé, cela vaudra toujours mieux que ces anglicismes qui relèvent notre brouet quotidien. Mais c'est justement là que réside le problème : ce recours au latin est moins un retour aux sources qu'un alignement — au mieux inconscient, servile au pis — sur les pratiques anglo-saxonnes, au sein desquelles versus a, depuis belle lurette, droit de cité et de tribune. Dans un précédent billet que l'on n'aura aucun mal à retrouver sur la Toile, nous avions déjà remarqué que le RIP qui, sur certaines banderoles de supporteurs de Ligue 1, saluait ironiquement l'agonie de l'équipe adverse était sans doute moins à traduire par « Requiescat in pace » que par « Rest in peace » !
Si désormais l'anglais, tel un clown d'Halloween, avance masqué, il y a lieu d'avoir peur...